Colloque international organisé par le centre de recherche ARTES / EA CLARE 4593 de l’Université Bordeaux Montaigne, en partenariat avec Gribouillis, festival de bande dessinée, livre jeunesse & dessin.
16 et 17 septembre 2021.
« Je n’aime pas beaucoup le mot illustratrice. Réalisatrice de livres me convient mieux » (V. Antoine-Andersen, Conversation avec Kitty Crowther, 2013). Cette gêne à utiliser le terme d’illustration est aujourd’hui partagée par beaucoup. Elle se comprend au regard du sens que le mot a pris à travers l’histoire des livres d’images : l’illustration a longtemps été assimilée à une image « généralement exécutée pour être intercalée dans un texte imprimé afin de le rendre plus compréhensible, de compléter l'information qu'il apporte, de le rendre plus attrayant » (CNRTL). Évidemment, les développements de l’album jeunesse contemporain ont montré combien l’image n’est pas secondaire, mais au centre d’une forme narrative à l’extraordinaire potentiel de création. Parler d’illustration oblige d’abord à se mettre d’accord sur les mots, afin d’oublier l’imagerie décorative au service d’un texte. Illustrateurs et illustratrices sont souvent auteurs ou autrices, fabriquent leurs albums à travers des processus de recherche complexes, et leurs pratiques se déploient aussi sous des formes multiples, qui débordent le support livre.
Cette question du support serait sans doute une première manière de définir l’illustration. Illustrer, ce serait avant tout penser et créer des images en fonction de leur destination. L’album reste l’espace privilégié de l’illustration, mais celle-ci se décline aussi sur des supports multimédia, affiches, journaux, couvertures de livre, programmes culturels ou scientifiques… et sur toutes sortes d’objets. Illustratrices et illustrateurs produisent des images qui sont ainsi des multiples, et sont appelées à être diffusées dans des contextes variés et pour un très large public.
Utilisée comme image de communication, l’illustration croise d’autres domaines comme le design graphique. Mais elle s’en distingue par son caractère narratif, par son rapport au dessin, et par la singularité des univers proposés par chaque illustrateur.
Il y a par ailleurs des liens évidents entre bande dessinée et illustration, avec une nuance : le terme « BD » concerne plutôt des récits dessinés sous forme de séquences, et relativement longs. Le caractère synthétique de l’illustration, comme la variété des supports qu’elle explore, permet d’en préciser la définition par rapport aux autres formes de récit dessiné.
Enfin, s’il est possible de s’attacher au mot « illustration », c’est en raison de son étymologie, la lumière. On pourrait dire que l’illustration met en lumière, fait apparaître ce qui ne peut être vu : par exemple la pesanteur, la fragilité, le manque, l’espoir, le rire… autant de sensations produites dans un espace visuel et narratif. Une mise en lumière qui se joue aussi dans la pratique, comme le formule si bien encore Kitty Crowther : « Quand je commence à dessiner, je vois un personnage qui apparaît et je le dessine. Puis ce dessin m’emmène à son tour vers un autre dessin. Quand des images se présentent dans ma tête, elles sont encore à l’état de vision floues et je ne peux pas les reproduire telles quelles, car ces projections manquent de netteté » (V. Antoine-Andersen, 2013).
Le colloque Recherche et création en illustration propose alors de penser l’illustration à partir de l’expérience pratique, d’en définir les enjeux, d’en observer les conditions de production, les dynamiques de création et les protocoles de recherche. Une forme d’état des lieux donc, dans un domaine longtemps absent des programmes universitaires, alors que l’illustration occupe une place importante en France, grâce à un secteur éditorial dynamique et audacieux, et grâce aussi à certaines grandes écoles publiques (HEAR de Strasbourg, ESAL d’Epinal, Ecole Estienne, ENSAD ou EESI).
Le colloque correspond ainsi à la volonté de développer un pôle de recherche et de formation en illustration à l’Université Bordeaux Montaigne. Il fait suite à l’ouverture du master Illustration en septembre 2020, une formation inédite dans les universités françaises, et intégrée à un réseau international d’écoles d’art et d’universités.
Cet événement accompagne par ailleurs la forte dynamique régionale autour du livre, de la bande dessinée et de l’illustration, qui marque l’identité de la Nouvelle Aquitaine, et dont témoigne encore le nouveau festival Gribouillis auquel il est associé.
Le colloque s’inscrit enfin dans les axes du centre de recherche ARTES de l’Université Bordeaux Montaigne, et fait notamment suite au séminaire Écriture et création (dir. P. Sauvanet, Cahiers d’Artes n° 12, PUB, 2016) et au colloque Réalités de la recherche (collective) en arts (dir. P. Baumann, PUB, 2019). Il s’agit de nouveau de se situer du côté de la fabrique des œuvres, de penser ensemble recherche et création. Les interventions pourront ainsi prendre la forme de communications, de tables rondes, ou de performances, avec une parole croisée entre universitaires et artistes.
Pour comprendre les processus de création et les méthodologies de recherche à l’œuvre en illustration, on interrogera en particulier :
- les formes et usages du dessin : esquisses, carnets, narration… le dessin pour penser, chercher, raconter.
- la part de l’expérimentation graphique, du hasard, de l’errance ou de l’improvisation.
- les espaces de travail, contextes de production et temporalités.
- la place essentielle du livre et la variation des supports.
- la dimension collective, dans le cadre de créations communes, des relations avec une éditrice ou un éditeur, des collaborations avec une autrice ou un auteur.
Modalités de soumission
Les propositions de communication sont à envoyer à l’adresse suivante : julien.beziat@u-bordeaux-montaigne.fr
Merci d’envoyer votre proposition sous la forme d’un résumé de 300 mots environ, avec un titre, et accompagné d’une brève bio-bibliographie.
Communication de 25 minutes. Formats différents pour les interventions artistiques.
Comité scientifique :
Pierre Baumann, Professeur d’Arts plastiques, UBM.
Julien Béziat, Maître de conférences en Arts plastiques, responsable du master Illustration, UBM.
Pierre Bourdareau, Maître de conférences en Design, UBM.
Anne-Perrine Couët, Illustratrice, enseignante UBM.
Marie Escorne, Maître de conférences en Arts plastiques, UBM.
Pierre Sauvanet, Professeur d’Esthétique, UBM.
International conference organized by the ARTES / EA CLARE 4593 research group (Université Bordeaux Montaigne), in partnership with Gribouillis (Bordeaux comics, children’s book and graphic design festival).
September 16-17, 2021.
"I don't like the word illustrator very much. Director of books suits me better ”(V. Antoine-Andersen, Conversation avec Kitty Crowther, 2013). Many people nowadays steer clear of the term “illustration.” Their reluctance makes sense with regard to the meaning assigned to the word throughout the history of picture books—for a long time illustration would refer to pictures “generally produced to be inserted within a printed text in order to make it more comprehensible, complement the information it provides, and make it more attractive” (CNRTL). However, the contemporary evolution of illustrated children’s books has shown that images play a central, not secondary, role in this narrative form with outstanding creative potential. Using the word “illustration” entails some preliminary agreement about its meaning so as to put aside any idea of decorative imagery designed to simply adorn a text. Illustrators are frequently authors in their own right, who create books based on complex preliminary research and whose practices assume multiple forms transcending standard book formats.
The format is a variable that provides an entry into the definition of illustration. Illustrating is primarily about imagining and creating images adjusted to certain goals. Illustrated books are privileged instances of this approach but multimedia formats, posters, magazines, book covers, conference or festival programs, and all sorts of objects actually resort to illustration. Illustrators are fundamentally makers of images that are destined to undergo mass reproduction and be disseminated in various contexts for many audiences.
Whenever illustration is used for communication purposes, it intersects with other fields, such as graphic design. Yet it sets itself apart from the latter because of its narrative specificity, its relationship to drawing, and the illustrator’s ability to create singular universes.
There are obvious links between illustration and comics, with one key nuance though: the term comics most often refers to sequential-form drawn narratives — “graphic novels” if they tell long stories. Illustrations distinguish themselves from other types of drawn narratives thanks to their synthetic specificity and the variety of formats with which they are compatible.
Finally, any focus on illustration should be underpinned by the term’s etymological root, light. Illustration sheds light on and makes visible what cannot be seen: gravity, fragility, lack, hope, laughter... so many sensations likely to be produced in a visual and narrative space. Such highlighting also occurs in the illustrator’s very agency—as Kitty Crowther once again puts it: “When I start drawing, I visualize a character and I draw it. Then the first drawing leads to another one. When images appear in my mind, they are still blurry visions and I cannot reproduce them as they are because they are yet unclear projections” (V. Antoine-Andersen, 2013).
The conference “Research and Creation in Illustration” means to address illustration from the angle of practical experience, outline its stakes and challenges, observe its conditions of production, dynamics of creation, and research protocols. Our ambition is to put together an overview with state-of-the-art value about a field that was for a long time neglected in higher education curricula, even though illustration is a significant reality in France thanks to several dynamic publishers and a number of high-profile art schools (Strasbourg’s HEAR, Epinal’s ESAL, Paris’ Ecole Estienne and ENSAD, Angoulême’s EESI). The conference is also a step in the creation of a research and teaching infrastructure in illustration studies at Université Bordeaux Montaigne, following the opening in September 2020 of a master’s program in Illustration, the first graduate degree of its kind in France, with connections to an international network of art schools.
The symposium also fits into the Nouvelle-Aquitaine region’s cultural policy of vigorous commitment to support publishing, comic art creation and illustration, and is associated with Gribouillis, Bordeaux’s newly created comic art and illustration festival.
The conference is sponsored by ARTES, the Université Bordeaux Montaigne research group on arts and aesthetics, and is a follow-up to the seminar Écriture et création (dir. P. Sauvanet, Cahiers d’Artes n° 12, PUB, 2016) and the conference Réalités de la recherche (collective) en arts (dir. P. Baumann, PUB, 2019). Its purpose is to combine research and creation and investigate how artworks are produced. We welcome oral presentations, round table panels, performances, and any format that will enable exchanges between scholars and artists.
To understand the creative processes and research methods specific to illustration, the following topics will be addressed (inclusively):
- the forms and uses of drawing: sketches, sketchbooks, narration; drawing as a means of thinking, research, storytelling
- the role of graphic experimentation, chance, creative wandering, improvisation
- workspaces, contexts of production, the temporality of production
- the book as essential format vs the variability of formats
- collective creation: co-authoring, relations with publishers, writer-artist team-ups.
The language of the conference will be French.
Please submit proposals including the author’s name/title, institutional affiliation, e-mail address, presentation title and 300-word abstract, along with 100-word bio to julien.beziat@u-bordeaux-montaigne.fr.
Scientific committee:
Pierre Baumann, Professor of Arts, UBM.
Julien Béziat, Associate professor of Arts, co-ordinator of the master’s program in Illustration, UBM.
Pierre Bourdareau, Associate professor of Design, UBM.
Anne-Perrine Couët, Illustrator, instructor, UBM.
Marie Escorne, Associate professor of Arts, UBM.
Pierre Sauvanet, Professor of Aesthetics, UBM.